vendredi 14 février 2014

Balade insolite et coquine en France - Sur la trace des anciennes maisons closes - 3ème partie

Les maisons closes à Paris, fréquentation, chiffres clés, ...

En 1870, la police estimait la fréquentation des différentes maisons closes à 400 000 clients par jour (autrement environ 1/4 de la population masculine parisienne avait des relations sexuelles avec des prostituées et majoritairement des hommes mariés). A l'époque, les maisons closes était des lieux de détente faisant partie intégrante de la vie social. On pouvait autant y croiser des hommes d'affaires respectables que des étudiants -principalement en période de vacances scolaire-. 

Pour satisfaire tous ces clients, Paris comptait pas moins de 155 000 femmes déclarées officiellement comme prostituées, mais la police avit à la même période effectuer 725 000 prostituées clandestines. 
De nos jours en comparatif, la France entière compte entre 18 000 et 20 000 prostituées dont seulement 1 050 à Paris. 


Le recrutement se déroulait dans de petites pensions de province et dans des hôpitaux notamment dans le service de maladies vénériennes. Les filles étaient contraintes à réaliser plus de 70 passes par jour au minimum - mais certains bordels de luxe limitaient les passes à 3 par jour et à 2 le dimanche-.

Sachez qu'à l'époque les hommes n'avaient pas le droit de diriger ce type d'établissement.

La maison close "Le Chabanais" faisait partie des rendez-vous "Paris by night" que le service des protocoles de l'Elysée organisait pour les chefs d'Etat en visite officiel - par soucis de confidentialité et de discrétion, leurs agendas respectifs affichait "visite du Sénat".




Tarifs de 1915 de Mademoiselle Marcelle Lapompe 
69 rue du Chat Noir avec des prestations à la carte : 
gou­glou­tage du poi­reau avec pres­sion de la main au prix de 3,50F, 
bran­lage à la mouche avec petit supplément langue dans le trou du cul (très demandé)  ... 
  Après quelques recherches sur le web, il apparaît que Mar­celle Lapompe serait l’un des pseu­do­nymes de
Renée Dunan (1892 
- 1936 ou 44 ou 44), qui est une écri­vain, poé­tesse fran­çaise,
critique littéraire redoutée, féministe, anarchiste, militante pro-nudiste, bisexuelle, grande admiratrice de Sade.
Elle se distingua surtout en tant qu'auteur de textes érotiques.
Son exis­tence et ses mul­tiples pseu­do­nymes res­tent flous.
Née à Avignon, on sait qu'en 1927, elle habitait au 86 boulevard Voltaire à Paris.
Si vous souhaitez en savoir un peu plus sur Rénée Dunan : cliquez-ici
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Si vous souhaitez en savoir plus sur le sujet, je vous suggère ce livre :
"L'age d'or des maisons closes" de Alphonse Boudard
- Edition Albin Michel -


La fermeture des maisons closes 

Le 13 décembre 1945, Marthe Richard dépose un projet de fermeture des maisons closes devant le conseil municipal. Sa proposition est votée et le préfet décide alors de fermer les maisons du département de la Seine dans les 3 mois. Marthe Richard -soutenue par le ministre de santé publique- commence alors une campagne de presse pour le vote d'une loi afin de généraliser les fermetures.
Le 9 avril 1946, le député Marcel Roclore présente le rapport de la Commission de la famille, de la population et de la santé publique, et conclut à la nécessité de la fermeture. Le député Pierre Dominjon dépose une proposition de loi dans ce sens.
La loi qui porte d'ailleurs son nom : Marthe Richard, est votée le 13 avril 1946. Puis peu de temps après le fichier national de la prostitution est détruit et près de 1400 établissements sont fermés. Nombre de tenanciers se reconvertissent alors en propriétaires d'hôtels de passe, la prostitution étant devenu une activité libre où seules son organisation, son exploitation ou ses manifestations visibles sont interdites.

Pour la petite histoire, Marthe Richard, fugueuse à répétition, part à Nancy, elle a alors 16 ans quand elle croise sur son chemin un italien dont elle tombe amoureuse. Celui-ci ce dit sculpteur mais est en fait proxénète. Elle devient trés vite prostituée dans des "bordels à soldats" à Nancy où elle pratique plus de 50 passes par jour. Elle fût par la suite dénoncée par un soldat pour lui avoir transmis la syphilis et fichée par la police - inscrite comme prostituée mineure le 21 août 1905-. Contrainte de s'enfuir, elle part à Paris et entre dans un "établissement de bains" de haut standing -rue Godot de Mauroy- où elle y rencontrera un riche industriel Henri Richer qu'elle épousera le 13 avril 1915. Elle deviendra alors une respectable bourgeoise et demandera à être rayée du fichier national de la prostitution mais on le lui refusera. 
Veuve de guerre en mai 1916, elle entra au service du contre-espionnage français grâce aux contacts de son jeune amant de l'époque. Elle rencontre même au cours de ses aventures Mata Hari. Elle travailla également pour la résistance. Suite à un accident de voiture, sa carrière d'agent secret fût révélé dans la presse. On lui décerna même la légion d'honneur. 
Elle passera par la suite près de 5 ans dans les cabinets ministériels et fût même élue conseillère dans le 4ème arrondissement de Paris ce qui lui permis la rencontre de gens influents. 

Bien qu'elle fût mentionnées sur des documents officiels, ses exploits au sein de la résistance comporte de nombreuses contradictions troublantes...
En effet, en 1947, Jean Violan -agent secret russe naturalisé français- de son nom d'origine Joseph Davritschevy, raconte dans la presse qu'il avait eut l'ordre de surveiller de prêt Marthe Richard -il en tomba même amoureux-. Il précise même qu'aucun des hauts faits dont Marthe Richard s'était ventée n'apparaissent dans les archives militaires et que les mémoires de Marthe ne sont qu'affabulations.  
On découvre par ailleurs que l'inspecteur de la Sûreté nationale - Jacques Delarue - spécialiste des faux héros de guerre, enquêta deux années durant avant de l'accuser d'organisation de malfaiteurs, de vol de bijoux et de recel en juin 1954. A la suite de quoi, elle fût emprisonnée à la Petite Roquette mais bénéficia d'un non-lieu en 1955. 

Elle fonda par la suite un prix de littérature érotique s'appelant "Tabou", publiera des livres dont "Appel des sexes" en 1951 reprenant quelques peu ses mémoires et précisant d'ailleurs ne plus être contre la réouverture des maisons closes. Elle fît par la suite des conférences, parlant de sa "vie d'espionne". Remise en cause sur son passé d'espionne, de résistante, ... elle publiera début 1974 "Mon destin de femme" -ses derniers Mémoires- afin de se justifier. A nouveau sur le devant de l'actualité en 1978 - 1979, elle tiendra des propos confus lors d'une controverse sur la réouverture des maisons closes. Elle décédera 4 ans plus tard, le 9 février 1982, à l'âge de 93 ans à son domicile à Paris, emportant ses secrets avec elle. Elle est enterrée au cimetière du Père-Lachaise.

Marthe Richard, veuve à deux reprise -veuve Richer puis veuve Crompton - et créatrice du projet de loi de clôture des maisons closes, elle fût surnommée la "Veuve qui clôt" (en référence à la maison de champagne : "Veuve Clicquot"). 


La fermeture des maisons closes annonça non pas la du marché de sexe mais uniquement l'arrêt d'un suivi réglementé et répondant à des contrôles sanitaires plus ou moins strictes -selon les adresses et le standing des lieux- des lieux de travail et de vie des prostituées.



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vendredi 7 février 2014

Balade insolite et coquine en France - Sur la trace des anciennes maisons closes - 2ème partie


Pour découvrir la première partie de cette article, cliquez ici

Voici la suite de mon article "Balade insolite et coquine en France - Sur la trace des anciennes maisons closes". La première partie vous proposait de découvrir l'histoire et les adresses des anciens bordels de Paris. Cette deuxième partie vous fera découvrir les adresses d'anciennes maisons closes un peu partout en France.

Lyon

Ancienne maison close 25 rue Tupin

Marseilles

"Le Mignon Bar" rue de la Bouterie 13010 Marseilles (Vieux Marseilles) 
Avouez que le nom de la rue était déjà évocateur ... 

Bourg en Bresse

- Ancienne maison close rue Prévôté anciennement rue des Étuves vieilles 01000 Bourg-en-Bresse a l'angle de la rue Samaritaine 

- "Lupanar" 5 rue du 4 Septembre 01000 Bourg-en-Bresse

- "Le Tabarin" rue du Pavillon 01000 Bourg-en-Bresse

Reims

- "Le palais oriental" coin de la rue de la madeleine 51 Reims
Pour en savoir plus ... cliquez-ici.

Tours

- "L'Étoile bleue" 15 rue du Champ-de-Mars à Tours.
Cet endroit peut se visiter. Vous y découvrirez des fresques érotiques, des mosaïques ... Il est de nos jours le siège de la Jeune Chambre économique.



Dans mon prochain article, vous découvrirez la vie des prostituées de l'époque et leurs lieux de travail.  


Pour lire la suite, cliquez ici et accédez à la 3ème partie


vendredi 31 janvier 2014

Balade insolite et coquine en France - Sur la trace des anciennes maisons closes - 1ère partie

Interdites en France depuis 1946 par la loi dite Marthe Richard, il subsiste encore des vestiges des maisons closes un peu partout en France. 
Sachez qu'en 1945 avant leur fermeture, il existait plus de 195 maisons closes a Paris pour 1150 filles.
Durant l'Occupation, les autorités allemandes soucieuses d'assurer le « ravitaillement » sexuel des militaires et de limiter au maximum les contacts de leur armée avec la population civile féminine décidèrent de réquisitionner quelques maisons closes à Paris. Les services sanitaires de la Wehrmacht furent chargés d'organiser la réouverture et le contrôle sanitaire de ces établissements. C'est le capitaine Haucke commissaire de la Geheime Feldpolizei qui fût chargé de gérer l'activité de la prostitution parisienne. Il affecta d'emblée 5 établissements haut de gamme aux officiers : "les belles poules", "le sphinx", "le chabanais", "le one-two-two" et la maison close située à l'époque au 50 rue Saint-Georges.

A l'époque, toutes les maisons de tolérance de Paris et de province possédaient une insigne distinctive et qui date de la période romaine : une lanterne rouge, ce qui permettait de connaître l’activité des lieux sans mettre une enseigne écrite plus explicite.

Ami(e)s parisien(ne)s vous habitez peut-être l'une de ces anciennes adresses sans le savoir !  

Je vous propose donc aujourd'hui un tour de France historique sur les traces d'anciennes maisons closes (adresses à l'appui). 



Paris

- "La Fleur Blanche" 6 rue des Moulins 75001 Paris - Métro Pyramide 
Ce bordel a ouvert ses portes vers 1890 et était notamment fréquenté par Toulouse Lautrec, célèbre pour sa chambre des tortures. Lieu doté d’un immense escalier en bois pastel et d’angelots féminins sculptés au-dessus des portes.

- "Le Chabanais" 12 rue Chabanais 75002 Paris - Métro Pyramides 
Il s'agit du plus ancien bordel de luxe de Paris, ouvert de 1878 à 1946. Il fût tenu par madame Kelly. Les chambres avaient pour noms : Edouard VII, espagnole, japonaise, mauresque, indienne, chambre russe ou encore les salons Louis XV ou Pompéien.

- "Aux belles poules" 32 rue Blondel 75002 Paris
A cette adresse subsiste encore des faïences qui sont aujourd’hui classées (mais invisibles). A l'extérieur, le carrelage en céramique rouge sang tranche sur la sobriété des façades voisines. A l’intérieur, masqués par des tuyaux, de belles plaques en faïence annoncent clairement la couleur : "Aux Belles Poules".
Ou à quelques pas ...
- "Au moulin" 16 rue Blondel 75002 Paris
Aux courbes et au décor floral art nouveau. 
L’activité de la rue survécut à la fermeture des bordels en 1946, et fut pendant 60 ans le fleuron de la prostitution de rue.


Au Moulin - 16 rue Blondel à Paris


- Maison close au nom inconnu 06 rue du moulin 75002 Paris 
Il reste un escalier magistral en bois et des angelots féminins sculptés sur le dessus des portes. 

- "Chez Christiane" 26 rue Saint Sulpice 75006 Paris 
Lieu de sodomie et de sado-masochisme

- "Miss Betty" 36 rue Saint Sulpice 75006 Paris


- Maison close au nom inconnu 27 rue de l'échaudé 75006 Paris 

- "Le One-two-two" 122 rue de Provence 75008 Paris 
A l'époque, le One-two-two était l'une des plus luxueuses et illustres maisons closes de Paris. Elle était également un cabaret ouvert de 1924 à 1946. Son nom lui vient de son adresse 122. Durant l'occupation allemande -lors de la Seconde Guerre mondiale- il fût un lieu de détente pour de nombreux officiers de l'armée allemande. Fréquenté par la haute société, autant pour y être vu (certains hommes y dînaient avec leur compagne) que pour profiter des charmes de ses "pensionnaires", le One-two-two y vit défiler en autres Léopold III (roi des Belges), Randolph Churchill, Fernandel, Tino Rossi, Sacha Guitry, Jean Gabin, Chaplin, Cary Grant, Humphrey Bogart, Katherine Hepburn, Mistinguett, Marlene Dietrich, Édith Piaf, ... 
Les initiés y pratiquaient « le voyage autour du monde », qui consistait à pratiquer des figures inspirées du Kama-Sutra, dans l'une des vingt-deux chambres. 
Chaque chambre était décorée comme des décors de cinéma et les femmes étaient mises en valeur sur des socles, avec des costumes et des éclairages. Il y avait notamment : La chambre de torture du Moyen Âge -avec carcans, chaînes et fouets-, La chambre des supplices -avec mise en scène de crucifixion-, La cabine de paquebot transatlantique, La cabine de l'Orient Express -avec le son des trains enregistré-, Le grenier à foin, La chambre igloo, La chambre corsaire -avec un lit à baldaquin qui tangue avec le roulis, le mât pour s'accrocher et des jets de paquets de mer à grands coups de seaux d'eau par des assistantes -, La chambre champêtre, La chambre égyptienne avec Cléopâtre, La chambre romaine, ambiance d'orgie de triclinium, La chambre Renaissance avec les courtisanes de François Ier, Les galeries des glaces -comme un petit Versailles avec d'immenses miroirs pivotants- ...



Les cuisines du One Two Two au 122 rue de Provence à Paris

- "A l'Etincelle" rue Mansart 75009 Paris (Montmartre) - Métro Blanche
Actuellement fermé, il a ouvert ses porte en 1941 et tenait plus du cabaret que de la maison close.

- "Le Sphinx" 31 boulevard Edgar Quinet 75014 Paris - Métro Montparnasse
Il s'agissait d'un cabaret bordel trés cher. 
Le Sphinx se distinguait par une architecture et des décors d'inspiration néo-égyptienne.
Pour la petite histoire, Le Sphinx a reprit l’emplacement d’un ancien marbrier funéraire, dont le sous-sol était en communication directe avec les catacombes. Lors de la construction de l’immeuble, une porte permettait un repli discret vers les souterrains en cas de besoin. Cet établissement appartenait à quatre associés, dont Charles Martel, lié aux gangsters Paul Carbone et François Spirito à Marseille, qui exploitent de nombreux bordels sur la Côte d’Azur. Martel confia la gérance du Sphinx à Georges Le Mestre et à sa femme Marthe Marguerite, dite « Martoune », la tenancière. La brigade mondaine surveillaient de près le Sphinx, qui est l’un des plus luxueux bordels parisiens dans les années 30. Des fiches de police, des écoutes et des photographies étaient prises pour surveiller la clientèle.
De cet endroit l'on sait que la maison emploiait 5 sous-maîtresses et 65 pensionnaires en tenue fantaisie. Cette maison de tolérance était ouverte de 15 heures à 5 heures du matin, avec 3 passes par femme et par jour en semaine, 2 le dimanche, pour un tarif unique de 30 francs plus pourboire. Parmis les célébrités ayant fréquenté salons ou chambres de cet établissement : Joseph Kessel, Georges Simenon, Jacques Prévert, Jean-Paul Sartre, Colette, Simone de Beauvoir, Ernest Hemingway, Marlene Dietrich, Errol Flynn, Gary Cooper, ... « Martoune » ajoute dans ses mémoires avoir accueilli Eva Braun, avec des amis en 1932, puis avoir vu Hitler au Sphinx, lors d'une visite éclair à Paris. Après la guerre, le bâtiment fût réquisitionné pour loger des couples d'étudiants convalescents de la Fondation de France. L'établissement a été détruit en 1962 par des promoteurs emportant avec lui ses fresques de Van Dongen et ses décorations égyptiennes.


- Maison closes au nom inconnu 29 rue Joubert 75019 Paris
Pour la petite info, Toulouse Lautrec la fréquenta.  
Elle fût ouverte avant 1857.

- "L’Étoile de Kléber" 4 rue Paul-Valéry 75016 Paris

- "Le Panier Fleuri" 22 rue Bayard  75008 Paris
De nos jours, à cette adresse, vous y trouverez la station de radio RTL

- "Le Fourcy" 10 rue de Fourcy 75004 Paris

- Maison close au nom inconnu 4 rue de Hanovre 75002 Paris

- "Alys" 15 rue Saint-Sulpice 75006 Paris

Ou encore :
39 rue Pasquier (8e arr.)
2 rue de Londres (9e arr.) où Amélie Élie, qui a inspiré le film Casque d'or, a fini sa carrière.
50 rue Saint-Georges (9e arr.)
29 rue Saint-Lazare (9e arr.)
9 rue de Navarin (9e arr.)
11 rue de l’Arcade (8e arr.) qui fut détenu en partie par Marcel Proust
106 boulevard de la Chapelle (8e arr.) - Métro Barbès


Beaucoup de ces immeubles ont été conservés, mais présentent des façades très neutres de nos jours.